Depuis cinq jours, leur slogan favori a changé. Mais leur Marseillaise à eux, ils la chantent toujours : «Libérez les sans-papiers/ Donnez-nous la résidence/ La France, la France/ Régularisée/ Et tous les sans-papiers...» Une autre devise a pris le relais : «Le Pen, t'es foutu, le peuple est dans la rue.» «Nous sommes tous concernés», assure Romain, Béninois au physique impressionnant, porte-parole de la Coordination nationale des sans-papiers et chef de file d'une troupe qui arpente le bitume depuis plus d'un mois. Le 23 mars, ils étaient une cinquantaine, baskets neuves et moral d'acier, à quitter à pied le vieux port de Marseille. Direction Paris, pour une marche nationale dont le but est d'obtenir une régularisation.
Ami ou ennemi. Sénégalais, Marocains, Algériens, Thaïlandais... tous réclament «le droit de vivre, tout simplement». En somme, «des papiers». Aujourd'hui, ils sont une soixantaine aux portes de Paris. Fatigués physiquement, épuisés moralement. Et plus motivés que jamais. «On ne s'attendait pas à ce résultat de Le Pen, avoue Romain. Mais on va s'adapter à la situation. On se méfie de la droite, on se souvient de l'expulsion des sans-papiers de l'église Saint-Bernard. Mais pour l'instant, le plus important, c'est sauver la République.» Jusqu'au 5 mai, ils soutiendront Chirac. Et le 6 mai : «Tous à l'Elysée !»
«Mais c'est pas si terrible, explique Aminata. Maintenant, on sait qui on aura en face. Jospin, on ne savait pas s'il était un ami ou un ennemi... En fait,