Jean Jouzel, chercheur au Commissariat à l’énergie atomique (CEA), dirige l’Institut Pierre-Simon-Laplace et préside l’Institut polaire Paul-Emile-Victor. Expert pour le compte de l’ONU, c’est un spécialiste de l’étude des climats passés.
En 1992, à Rio, les climatologues lançaient déjà un signal d'alarme sur le changement climatique causé par les émissions de gaz à effet de serre. Cette menace s'est-elle éloignée ?
Bien au contraire, notre diagnostic s'est affermi. En 1990, les scientifiques du Giec (Groupe intergouvernemental sur l'étude du changement climatique) mis en place par l'ONU restent prudents sur la relation entre le réchauffement du XXe siècle et l'augmentation de l'effet de serre, due pour 60 % au gaz carbonique (pétrole, charbon et gaz). En 1995, le Giec estime qu'un faisceau d'éléments «suggère une influence déjà perceptible de l'homme sur le climat». Cette conclusion joue un rôle clé dans les négociations du protocole de Kyoto visant à réduire les émissions. Le rapport de 2001 affirme que le réchauffement du XXe siècle ne peut être expliqué sans tenir compte des activités humaines. Si aucun effort n'était fait pour infléchir la croissance des émissions de gaz car bonique, elles passeraient d'environ 7 Gtc (milliards de tonnes de carbone) par an, dont environ 6 Gtc pour les combustibles fossiles, à près de 30 Gtc. Le réchauffement à l'horizon 2100 serait alors compris entre 3,2 et 5,6 °C.
Quels risques ces changements peuvent-ils représenter pour les sociétés ?
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