A la lecture de la liste des témoins, au premier jour du procès en appel de l'affaire Dumas, chacun s'était retourné pour le voir. Claude Gosselin, 76 ans, avait seulement dit «présent», d'une voix grave, au fond de la salle. Certains l'avaient confondu avec André Tarallo, l'ancien monsieur Afrique du groupe. L'âge, la corpulence, la calvitie, sans doute. L'expérience aussi : Gosselin, ancien directeur comptable du groupe Elf, a passé plus de vingt ans dans le groupe pétrolier. C'est l'homme qui marche au milieu de la rue par crainte des micros, avait murmuré un avocat. Premier des témoins entendus, hier, par la cour d'appel de Paris, Claude Gosselin, convoqué par le ministère public, a résolument parlé devant le micro. Un comptable sait toujours beaucoup de choses. Trop de choses. Gosselin était dans le secret de tous les virements internationaux du groupe Elf et de ses multiples caisses noires destinées à payer les intermédiaires, notamment la société Timor, basée au Liechtenstein, d'où sont partis 59 millions pour Christine Deviers-Joncour.
«Consignes». «Ces opérations confidentielles avaient deux circuits, explique doctement Gosselin. Un circuit principal, à travers la société Rivunion (la trésorerie étrangère fondée à Genève). Mais pour M. Sirven, spécifiquement pour lui, il a été créé un circuit bis à travers Timor. Timor servait à des virements dans les comptes désignés par Sirven.» Le comptable déroule sa pelote, bras croisés. A sa gauche, Roland Dumas prend des notes