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Libération

Au tribunal, les larmes rares des tueurs au volant

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Quand M. Tout-le-monde se retrouve accusé.
publié le 2 décembre 2002 à 1h58

Ce sont des morts sans histoires. Ceux qui les ont tués n'en ont pas davantage. La justice les appelle «homicides involontaires». Ils font partie de ces gens comme vous et moi. Carrossier, employée agricole, conseiller de gestion, intérimaire. L'accident, ils l'ont eu en Opel Astra, en Golf et BMW. Ils sont mariés, père de famille, célibataire. De 21 à 50 ans, riches, pauvres, classes moyennes. Ils habitent en ville, dans une cité, en pleine campagne. Ils sont souvent sans casier. Comme ceux qu'ils ont tués.

Passage piéton. La plupart du temps, ils ont du mal à s'en remettre. A Meaux, en novembre, son avocat dit de Senel, 23 ans : «Il se considère comme un tueur. Sa vie est flinguée.» A Privas, en septembre, la défenseure de ce quinquagénaire qui conduisait sous l'emprise de l'alcool et de tranquillisants dit que son client a perdu le sommeil depuis cet accident. A Saint-Brieuc, il y a une semaine, un conducteur confie dans les couloirs qu'il aurait, somme toute, «préféré y passer». Mais à Lille, un avocat chuchote après un jugement plutôt favorable ­ prison avec sursis ­ pour son client : «Je l'ai mis hors de mon cabinet, il parlait de la victime comme s'il avait écrasé un chien. Il s'en fiche de ce qu'il a fait.» Celui-là a eu de la «chance». Il n'en avait laissé aucune au jeune homme qu'il a envoyé ad patres, valser à 25 mètres sur un passage piéton. D'habitude, devant les tribunaux, ils s'excusent rarement. Ils essuient une larme quand on évoque les faits, pleurent, reste