Révolte, compassion... Quatre infirmières réagissent au procès de Christine Malèvre. Et racontent comment, dans leur quotidien à l'hôpital ou en libéral, elles affrontent la mort de leurs patients et les situations d'euthanasie.
Yolaine, 29 ans
«Le médecin pratique le geste»
Infirmière de réanimation depuis six ans, Yolaine est dans le service du Pr Jean-Yves Fagon (hôpital Georges-Pompidou, Paris) :
«On ne connaît pas vraiment le fond de l'histoire, mais tous ses collègues ont quand même l'air de dire qu'elle était un peu particulière, Christine Malèvre. En tout cas, faire ce geste toute seule ne doit pas être facile. Moi, je suis soulagée de ne pas avoir à décider de ça. Ici, quand la question de limitation de soins (en réanimation, on ne parle pas d'euthanasie) se pose, il y a une discussion de groupe, et c'est souvent le médecin qui fait le geste. Mais l'environnement de la mort, c'est trop dur. Parfois, on rentre le soir en se disant qu'"on en a tué trois dans la journée". C'est terrible, même s'il y a le soulagement de se dire que, pour le malade, c'est la meilleure chose. Depuis deux ans, dans le service, il y a des groupes de paroles avec un psychologue. C'est toujours le thème de la mort qui revient. Je sens qu'il faut que je prenne l'air. Ce métier est usant, peut-être parce qu'il est très en dents de scie. La nuit, je rêve régulièrement de malades et de seringues, et quand je décroche le téléphone chez moi, je dis : "Allô, ici la réanimation médicale." Je me rends com