Grenoble envoyé spécial
Une assistante sociale avait dit à Sophie (1) : «Etant donné votre histoire, il vaut mieux ne rien savoir.» Abandonnée à la naissance, la jeune femme a imaginé le pire, ressassé des histoires de viol collectif. Puis, il y a trois semaines, elle a retrouvé son père. Et le récit qu'il lui a fait ressemble à une histoire d'amour. Sa mère n'était pas libre, et lui était ouvrier tunisien, à la fin des années 60. Après la naissance, l'homme avait demandé à voir l'enfant, et tenté de le reconnaître. Mais l'administration l'en avait dissuadé, avant de cacher à sa fille ses origines. Pour les découvrir, Sophie a mené un combat juridique et politique, qui se poursuit aujourd'hui, au sein d'un collectif isérois d'ex-pupilles de l'Etat.
Véritable gageure. Ils sont neuf au total, et réclament les dossiers que leurs mères ont remplis au moment de l'abandon. Une gageure en Isère, où l'administration considère que l'anonymat s'impose aux enfants, même lorsqu'il n'a pas été expressément demandé. Le collectif a fini par interpeller André Vallini, président (PS) du conseil général de l'Isère (compétent sur ces questions). Il a mis du temps à comprendre l'enjeu avant d'annoncer au collectif, en janvier, qu'il avait demandé l'avis du Conseil national pour l'accès aux origines personnelles (Cnaop). «Mais la loi sur le Cnaop ne concerne en rien l'accès aux documents administratifs, conteste Pascal, l'un des membres du collectif. Nous n'avons demandé à personne de retrouver no