Longtemps livré aux pillards, le château de Bridoire, un manoir du XIIIe siècle de la région de Bergerac (Dordogne), est sauvé. Il vient d'être racheté par le ministère de la Culture au terme d'une procédure d'expropriation unique en son genre et d'une vaste enquête pour retrouver l'identité de son propriétaire : l'ex-empereur de Centrafrique, Jean-Bedel Bokassa.
«C'est une belle victoire», se réjouit Claude Leroy, le président d'une association de sauvegarde qui, depuis quinze ans, se bat contre «un propriétaire fantôme». Le plus difficile a été de trouver qui se cachait derrière la société Roume-Boufflers qui avait acheté la propriété en 1978 à un homme d'affaires suisse, pour 700 000 francs, une bonne affaire à l'époque.
Les membres de l'association se sont transformés en détectives, allant de Paris dans les ministères à Dakar où se trouve le siège de Roume-Boufflers. Ils découvrent d'abord que son gérant est l'une des figures de la «Françafrique» : Léon Boissier-Palun, aujourd'hui âgé de 86 ans, ex-ambassadeur du Sénégal dans plusieurs pays d'Europe. Cet ancien avocat à la cour d'appel de Paris aux multiples décorations «gérait les intérêts en France de plusieurs dignitaires africains, dont ceux de Félix Houphouët-Boigny et de Jean-Bedel Bokassa», raconte Claude Leroy.
Invoquant «la raison d'Etat», un ancien bâtonnier du barreau de Paris conseille aux «amis de Bridoire» de «laisser tomber». Pour les décourager, Léon Boissier-Palun multiplie les procédures pour «diffamation»