Lille, de notre correspondante.
C'est un café, le long d'une route de campagne, près de Lille. Tables en Formica, pompes à bière, patronne joviale, lumière rasante de fin d'après-midi. «Cocorico !» Par terre, quelques malles d'osier se mettent à chanter. Un homme en blouse grise vend des tickets. Trois euros pour l'arrière-salle. A l'entrée, un panneau interdit les appareils photo. C'est ici que les coqs se battent. Gradins de bois, éclairage au néon, casquettes, bérets, moustaches. Le public, une quarantaine de personnes, se connaît. Les femmes viennent aux nouvelles : «Elle est morte comme mon père, du lundi, enterrée du vendredi.» Les enfants attendent, sans crainte : ça ressemble à un dimanche ordinaire. Au café le Gallodrome, à Tourmignies, on «joue les coqs», certains dimanches.
La confrontation se passe sur un promontoire, un grillage ovale, deux portillons : c'est le «parc», ring sur une moquette beigeasse. Suspendus, deux cartons gris indiquent le prénom du propriétaire du coq, et sa ville. Pas de nom de famille, habitude héritée de la clandestinité. Le sacrifice obéit à un rituel. Face à face, deux hommes tiennent chacun un coq. A la place des ergots, une aiguille d'acier. Elle déchirera moins les chairs que l'ergot naturel. Si le coq survit il survit souvent , il sera mieux soigné. Chacun passe le doigt sur l'arme de l'autre, pour vérifier qu'elle n'a pas été aiguisée. Puis on présente les coqs, tenus serré.
Trentaine de «paires». Ils jettent leur tête l'un vers l