Mener une vie normale, c'était pour le couple Erignac une exigence. Même en Corse. «Mon mari, a dit hier Dominique Erignac à la barre de la cour d'assises spéciale de Paris, c'était l'homme qui décidait. Et il ne voulait pas changer nos habitudes. Il voulait bien connaître les gens de cette île. Mais il n'était pas suicidaire, il aimait beaucoup la vie.»
Frêle silhouette habillée de lin noir, Dominique Erignac parlait pour la première fois. Elle se tient droite à la barre. D'une voix sans affect, elle ranime en quelques mots la mémoire de son mari. «S'il avait senti un danger, il ne m'aurait pas emmené avec lui ce soir-là». Ce soir-là, le 6 février 1998, le préfet de Corse et son épouse se rendent à un concert. «Mon mari aimait la musique. Je ne me souviens même plus du programme. Beethoven, je crois...» Le couple quitte la préfecture en voiture. Sans chauffeur, c'est Claude Erignac qui conduit. «Mon mari n'aimait pas faire attendre les gens, surtout le soir. Il n'aurait certainement pas voulu faire attendre le chauffeur dans la voiture pendant le concert.» Claude Erignac dépose sa femme et part chercher une place de stationnement. «J'ai écouté le concert. Je ne voyais pas mon mari revenir. C'est peut-être bizarre, mais... Il y a des choses instinctives. Je voyais les gens qui bougeaient autour de moi et je restais sur mon siège, sans comprendre.»
Bout touchant. A 21 heures et deux ou trois minutes, Claude Erignac remontait la rue Colonel-d'Ornano, vers le théâtre. Il a croisé