Quand elle doit remplir les fiches de ses filles pour l'école, Radidja ne sait pas s'il faut qu'elle écrive «mariée» ou «séparée». Ou les deux. Alors elle laisse un blanc. Voilà cinq ans qu'Ousmane, son mari, a été expulsé au Sénégal, son pays natal. Depuis, elle fait des va-et-vient, tous les étés. Au début, elle y allait avec ses trois filles (Kheïra, Amy et Aïda, aujourd'hui 18, 14 et 11 ans) puis avec une seule à la fois, parce que le billet d'avion coûte cher. Aïda, la plus petite, est allée à cinq reprises voir son père à Dakar, mais appréhende les retours «parce qu'il ne rentre pas avec nous». Radidja pense qu'«elle a la haine contre lui parce qu'il n'est pas là». Aïda dit qu'elle trouve ça «injuste», mais qu'elle n'en veut à personne. Quand ses copines lui demandent où est son père, elle répond qu'il travaille à l'étranger.

Entreprise. Ousmane et Radidja s'étaient rencontrés chez des amis à Marseille, deux ans après son arrivée en France en 1982. Ils se sont mariés en 1987. Ils tenaient une petite entreprise de délavage de jeans qui a fermé au bout de cinq ans. Lui a commencé à se droguer. «Il avait des copains pas fréquentables», se souvient Radidja. En 1994, il écope de six ans de prison pour infraction à la législation sur les stupéfiants. Le juge ne le condamne pas à une interdiction du territoire. C'est le préfet qui s'en charge, via un arrêté d'expulsion quand sa carte de résident expire. «Je ne pensais pas qu'il serait expulsé, parce que je suis française», exp