Stéphane Rozès, directeur de CSA Opinion, analyse la crise provoquée par la canicule. Elle met en évidence, selon lui, le fossé qui se creuse entre les gouvernants et ceux qui, comme les urgentistes, assurent le bon fonctionnement de la société.
Faut-il, avec Bernard Kouchner, s'étonner que «l'on se tourne vers le gouvernement quand il fait chaud ou froid» ?
Non. C'est cohérent avec l'exception politique française. Il appartient aux gouvernants de mettre en oeuvre le principe de précaution. Et dès qu'une catastrophe se produit, c'est naturellement vers les responsables politiques que l'on se tourne. C'est à eux de prévenir les risques, qu'il s'agisse du risque sanitaire dans le cas de la vache folle, écologique avec le naufrage de l'Erika ou industriel avec l'explosion d'AZF.
L'UMP Christian Estrosi dédouane le gouvernement en mettant en cause «un phénomène d'abandon des familles».
Ce discours n'est pas audible. Nos sociétés ont socialisé l'ensemble des risques et les hommes politiques assument cet état de fait. Jacques Chirac a tout fait pour que des questions de santé (cancer, handicapés et sécurité routière) apparaissent comme une priorité des pouvoirs publics.
L'opposition parle de retard et de négligences, certains demandent la démission de Mattei.
Dans cette affaire, la polémique entre les partis politiques me paraît secondaire. Ce qui frappe, c'est que ce sont les urgentistes qui ont donné l'alerte. Ce sont eux qui critiquent l'appareil d'Etat. On voit qu'un fossé se creuse