Ils sont une trentaine, attablés dans une pièce du rez-de-chaussée qui fait office de réfectoire le soir. Beaucoup rentrent du travail. Une télé est accrochée au mur. C'est l'heure du journal. «Eux, c'est pire que nous», s'exclame l'un d'eux. «Eux», ce sont les laissés-pour-compte d'un tremblement de terre en Algérie dont il est question dans un reportage. «Nous», ce sont les personnes présentes dans la salle, toutes sans domicile fixe. Elles sont accueillies dans ce centre d'hébergement d'urgence d'Emmaüs près du boulevard Magenta, à Paris (Xe), pour une période de deux semaines renouvelable deux ou trois fois. Les jours sont comptés, d'autres attendent dehors. Un bon tiers des pensionnaires travaille. Ils sont «agents de propreté, agent de surveillance, déménageur, vendeur, serveur dans un restaurant rapide», égrène Lucette Coant, une travailleuse sociale du centre. Elle consulte ses fiches. Salaires : 1 000 euros, 1 060 euros, 1 100 euros et même 1 300 euros : «On a beaucoup d'hommes divorcés. Quand le couple éclate, la dame garde l'appartement avec les enfants. L'homme, lui, file à l'hôtel. Mais ça dure pas longtemps. Quand ils se retrouvent sur la paille, ils finissent par appeler le 115 (le Samu social, ndlr). C'est comme ça qu'on les récupère.»
Banc. Damien, 52 ans, l'auteur de la petite phrase devant la télé, est peintre en bâtiment. Il est inscrit dans plusieurs agences d'intérim. Et peut aligner sans difficulté des fiches de paie montrant une activité régulière. Gén