Au départ, c'est une histoire d'amour particulière, entre une jeune femme et son demi-frère. Sur la place publique, c'est «l'interdit universel», «l'un des tabous les plus profonds de l'humanité, une règle qui plane très au-dessus des droits de l'homme». L'inceste, poursuivent les juristes français en s'appuyant sur l'anthropologue Lévi-Strauss, «est socialement absurde avant d'être moralement coupable» (1). Le 6 janvier, la Cour de cassation devra dire si une adolescente née de l'inceste entre une soeur et son demi-frère peut être adoptée par son père... qui est donc également son oncle.
«Intérêt de l'enfant». C'est la première fois que la plus haute instance judiciaire est amenée à se prononcer sur une affaire de ce genre. Le droit français prohibe strictement l'établissement d'une double filiation pour un enfant né de l'union entre ascendants et entre collatéraux. Mais le 24 juin 2000, la cour d'appel de Rennes a autorisé ce père «incestueux» à adopter sa fille, «dans l'intérêt de l'enfant». Hier, l'avocat général Jerry Sainte-Rose a accusé les magistrats rennais d'avoir «commis une fraude à la loi et un détournement de l'institution de l'adoption». Il a demandé aux conseillers de rappeler que «l'interdit de l'inceste est la base absolument fondamentale du droit de la famille et l'un des piliers de notre société».
Marie a aujourd'hui 13 ans. Elle vit avec ses deux parents. Les experts psychologues et psychiatres qui ont donné un avis favorable à l'adoption décrivent une enf