Jean Paul II faisait venir à lui les foules par millions. Jacques Gaillot, évêque in partibus, préfère se consacrer aux petits groupes des déshérités, des «sans», des exclus de toute sorte. A sa manière, il est l'antipape. Etonnamment, il n'a pas gardé la moindre rancoeur contre les autorités romaines qui l'ont sanctionné voici dix ans, en le privant de son diocèse d'Evreux. L'homme mélange indéniablement naïveté et facilité à positiver. «Cet événement injuste, cette décision inéquitable m'ont fait comprendre la situation de tous ceux qui sont dans l'exclusion. J'ai été victime d'une injustice, cela me donne du crédit pour aller vers les exclus», dit-il très cléricalement, oubliant que son exclusion, comparée à d'autres, est celle d'un privilégié... Il ajoute : «Jean Paul II m'a mis à la marge mais je viens de passer dix années pleines. Parténia (l'évêché virtuel qu'on lui a attribué, ndlr) est le symbole de tous ceux qui ont le sentiment de ne pas exister, de ne pas être reconnus.»
Une journée typique de Jacques Gaillot, c'est une visite à des grévistes de la faim. Un rendez-vous inopiné avec des Africains sans papiers à la Fédération nationale du bâtiment pour plaider la cause de leur embauche : «A quoi bon faire venir des gens avec des quotas puisqu'ils sont sur place ?» Une action contre le chômage avec Droit devant dont il est coprésident ou avec le DAL (Droit au logement). De toute façon, il ne refuse jamais une sollicitation. «C'est sûrement son principal défaut, expli