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Libération

Les mots de trop pour le hameau de Lussaud

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publié le 16 septembre 2005 à 3h43

Lussaud, envoyé spécial.

Une brutalité inouïe pour répondre à la violence des mots. Pour avoir trempé sa plume dans du vitriol, l'écrivain Pierre Jourde a failli être lynché par des habitants de Lussaud, un hameau posé à 1 000 mètres d'altitude dans le nord du Cantal. La scène se déroule le 31 juillet dernier. L'auteur vient de retourner dans le «pays perdu», ce coin de France qu'il décrit dans un roman ainsi titré (1), où les odeurs d'excréments entourent des personnages rongés par l'alcool, le labeur et le temps.

Alice Liandier, 92 ans, avoue être un «peu courte d'oreille». Mais elle a tout vu, tout entendu. «On savait que Pierre Jourde arrivait. Il était avec sa compagne, leur bébé et ses deux enfants. Deux femmes qui l'attendaient sont venues devant sa maison suivies d'un homme âgé du village. Ils l'ont insulté, lui ont donné des coups. D'autres les ont rejoints, ils étaient six ou sept. Ils l'ont frappé, ont jeté des pierres sur sa voiture, cassé une vitre, mis des coups de pied. Tout en essayant de fuir, Pierre s'est défendu pour protéger sa femme qui tenait le bébé dans ses bras.» Jourde reconnaît avoir cogné les gens du village où sa famille habite depuis trois siècles. Ceux qu'il décrit comme ses agresseurs ont beau prétendre que l'auteur a frappé le premier, un autre témoin affirme : «Si Pierre était tombé, ils l'auraient lapidé.» Son fils de 15 mois a été légèrement blessé au visage par des éclats de verre. La famille Jourde réussit finalement à prendre la fuite en