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Libération

Quand «un grand» devient Legrand

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Le croisement absurde entre l'histoire d'un jeune footballeur et celle d'un enfant violé.
publié le 10 novembre 2005 à 4h30

Ça ressemble à ces films américains où deux personnages, bien installés chacun dans sa vie, n'ont aucune raison de jamais se croiser. Et soudain... Cette fois, c'est devant les assises de Paris, le procès de l'affaire d'Outreau que la cour revisite.

Marc (1) Delay est un petit garçon qui aime se déshabiller en classe et danser nu sur la table. Parfois, il hurle ; parfois, il mord. Il est puni, seul au bout de la cour. Alors, assis sur le sol, Marc crache dans la terre pour faire de la boue et il la mange. Nous sommes en 1996, Marc Delay a 4 ans et sa maîtresse, Emmanuelle Prieur, s'inquiète. Elle vient d'être nommée à l'école maternelle de la Tour du Renard, 80 élèves au milieu des HLM d'Outreau.

Maxime. Les travailleurs sociaux lui expliquent qu'elle n'a rien compris : les nouvelles de la famille Delay sont bonnes, au contraire. Thierry, le père, a promis de jeter ses cassettes pornos. Myriam, la mère, participe avec entrain aux entretiens. «Ils sont communicants, c'est ça qui compte.» Une maxime se répète à l'école : c'est déjà bien quand les parents se lèvent pour conduire les enfants et ne les oublient pas à midi.

De toute façon, chaque fois qu'Emmanuelle demande quelque chose, on lui dit «c'est normal». Normal, quand Marc Delay met des crayons dans le derrière des poupées au coin dînette de la classe : «Vous avez l'esprit mal tourné : il leur prend la température.» Normaux aussi, les gamins de 3 ans qui savent à peine dire «bonjour madame» mais articulent parfaitement «ta