Rennes correspondance
Ils sont installés, à chaque extrémité du banc des accusés. N'échangent pas un mot. Elle, plutôt belle femme avec ses cheveux bruns tirés en queue de cheval et un élégant blazer noir. Lui, dans son anorak vert et mauve, le regard fixe, affichant une mine de chien battu. Depuis mardi, Christine F., 41 ans, est jugée par la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine pour avoir tué quatre nouveau-nés. Jean-Yves F., 44 ans, son mari, auquel elle dissimulait ses grossesses, est jugé pour ne pas avoir «empêché ces crimes».
La première fois, c'était en avril 1997. Le couple, qui vit dans un petit hameau entre Rennes et Saint-Malo, a alors cinq enfants âgés de 3 à 13 ans. «C'était le soir, j'étais dans la salle d'eau, raconte-t-elle d'une voix posée. Les enfants étaient couchés, mon mari était quelque part dans la maison. J'ai mis une grande serviette sur le sol. En une demi-heure l'enfant est expulsé. Je l'ai regardé vite fait. C'était un garçon. J'ai attendu la délivrance et l'ai enveloppé dans un drap qui était dans la corbeille à linge. Presque complètement.» «Cela signifiait quoi pour vous ?» interroge Nicole Faugère, la présidente. «Je ne sais pas. Je pensais que mon mari serait arrivé. Qu'il aurait fait quelque chose.» Elle poursuit : «J'ai attrapé un sac en plastique sous l'escalier et j'ai mis le bébé dedans. Puis j'ai mis le sac dans le garage et je me suis couchée.»
En urgence. Jean-Yves dort déjà. Le lendemain matin, il se rend comme d'habitude à son travail i