Strasbourg correspondance
Le geste est saccadé. Président de la cour d'assises du Bas-Rhin, Jérôme Bensussan tourne les pages d'un grand cahier à spirales : «Pendant la nuit je ne me lève pas en cachette pour boire», lit-il à haute voix. «Savez-vous combien de fois Nicolas a écrit cette phrase ?» demande-t-il aux parents, à l'oncle et la grand-mère maternels du petit garçon de 9 ans, jugés jusqu'à vendredi pour «actes de torture ou de barbarie commis sur un mineur de moins de 15 ans, ayant entraîné la mort».
«2 772 fois.» Silence. Sur la table des pièces à conviction, devant les jurés, il y a aussi la corde à sauter qui a servi à lier les pieds et les mains de Nicolas, ainsi que la spatule de bois que chacun a maniée pour lui administrer des fessées. Incarcérés depuis août 2003, deux jours après le décès du petit garçon à la suite d'un traumatisme crânien, Isabelle et Fernand Holzmann, Bruno et Marie-Thérèse Vieira encourent la réclusion criminelle à perpétuité.
«Egocentrique». «Quel était le sens de ces punitions ?» demande, en vain, le président. Au premier rang du box, la grand-mère, Marie-Thérèse, 56 ans. Durant les auditions, elle raconte comment, au Portugal, quand le père rentrait saoul à la maison, les dix enfants se cachaient pour échapper aux coups de ceinture. Sa voix, aigrelette et traînante, enfle parfois. S'emporte et, d'un coup, les jurés peuvent imaginer comment elle a pu être avec Nicolas, qu'elle abreuvait d'insultes et de gifles. Puis de nouveau murée dans sa