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Libération
Interview

« Le discours xénophobe de l'extrême droite se banalise »

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publié le 27 mars 2006 à 20h44

Ancien diplomate de nationalité sénégalaise, Doudou Diène est rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme des Nations unies sur les formes contemporaines de racisme.

Dans son rapport 2005, la Commission nationale consultative des droits de l'homme note la hausse inquiétante des personnes qui s'avouent racistes en France. Ce phénomène est-il strictement français ?

Le racisme empire partout dans le monde. Mais ce qui rend cette augmentation particulièrement grave en Europe, c'est la conjonction de trois facteurs. D'abord, il existe une banalisation du racisme qui découle de la prégnance des politiques racistes et xénophobes des partis d'extrême droite qui imprègnent lentement les programmes des partis démocratiques, sous couvert de lutte contre le terrorisme. Un autre facteur est la légitimation montante du racisme de la part de certains intellectuels. Samuel Huntington, au-delà de sa thèse sur le clash des civilisations, développe, dans son nouvel ouvrage intitulé Qui sommes-nous ? (1), une théorie selon laquelle la présence des Latinos est une menace pour l'identité américaine. Il légitime ainsi la discrimination dont ces populations font l'objet. Le troisième facteur est l'amalgame, dans la plupart des grandes crises actuelles, entre les questions de race, de religion et de culture dans le discours politique, intellectuel et médiatique. Lors de la crise française des banlieues par exemple, Hélène Carrère d'Encausse a trouvé comme seule explication la polygamie.