Tribunal correctionnel de Paris
Au banc des plaignants, une policière, cheveux tirés, en uniforme. Dans le box, Alain, 58 ans, cheveux longs et gris, né en Guadeloupe, l'air ailleurs. La veille, à Barbès, lors d'un contrôle, les policiers balancent les maïs grillés d'une Africaine, vendeuse à la sauvette. «Un homme récupère les maïs, a déclaré la policière, je l'en empêche, et il crie : "Tu fais quoi ? Dans quel pays on vit ?" Il me prend mon bâton de défense, je l'agrippe, il me retourne un doigt.» Alain lève les yeux au ciel : «C'était peut-être une erreur de m'en mêler, mais je me disais : "Si ces femmes africaines pouvaient faire autre chose, elles le feraient", quand j'ai vu qu'on jetait leur maïs au milieu des détritus, ça m'a fait mal !» Il avance et recule, lève un bras : «La policière était rageuse, elle m'a tapé avec son tonfa, alors moi, je le saisis !» «C'est le rôle des policiers d'empêcher la vente illicite !» relève la procureure. Et elle requiert six mois dont quatre avec sursis et mise à l'épreuve. L'avocat sourit : «N'importe quel citoyen aurait passé son chemin, mais, à ses yeux, il était de son devoir d'intervenir.» Il montre Alain : «Il est dans un état limite, n'en pouvant plus de sa vie minable ; à 58 ans, il vit entre le RMI et Emmaüs !» Six mois avec sursis.
Voilà Patrick, dans sa chemise étrangement blanche et impeccable. Il y a deux jours, les policiers l'ont vu faire mine de lacer ses souliers à la terrasse