«Dites, m'sieur, c'est quoi la virilité ?» interrompt un élève. Au fond de la classe, les garçons se poussent du coude. Les filles du premier rang sourient, un brin méprisantes. «Ce sont les adjectifs qui viennent à l'esprit quand on parle des garçons, la masculinité si vous préférez», répond Régis Gallerand, le professeur de SES (sciences économiques et sociales) qui fait cours cet après-midi à la classe de seconde 12.
Puis l'enseignant reprend sa marche entre les tables, agitant les bras et modulant sa voix avec un art consommé d'acteur, pour capter l'attention : «Qu'est-ce qu'un homme ? Qu'est-ce qu'une femme ? Vous êtes-vous jamais posé la question ? Etre une femme, cela revient-il seulement à ne pas être un homme ?» Malgré la chaleur écrasante et le soleil qui pénètre dans la classe, les trente élèves suivent. A certains moments, lorsqu'ils apprennent par exemple qu'il y a soixante ans, très peu de femmes fréquentaient le lycée, ils semblent même franchement interloqués.
En ce mardi après-midi, Régis Gallerand, enseignant au lycée Jacques-Feyder d'Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), fait un cours un peu particulier : trois heures consacrées à «la construction sociale du genre, masculin-féminin», à travers un sondage réalisé en classe sur les clichés, des études de textes, des statistiques sur l'emploi, les diplômes et le partage des tâches ménagères par sexe. Pivot de l'expérience lancée avec Sciences-Po dans quatre lycées du département (1),