Tribunal correctionnel de Nantes
«Prêt !» signale l'huissier en alignant un gros tas de dossiers. «Allons-y !» annonce la juge. Le premier, c'est Jean-François, visage rouge et de travers : «Vu que j'ai pas d'avocat, je voudrais un recours !» «Vous avez reçu une lettre vous avertissant de l'audience, il y a déjà quatre mois !» objecte la présidente. Jean-François se tortille : «Le truc, c'est que je suis SDF, alors le courrier, hein !» La juge hausse le ton : «Vous savez lire ? Oui ? Quand vous lisez, vous comprenez ? Parce qu'un avocat vous a écrit ! Vous donnez plutôt l'impression de ne pas vous être soucié de votre affaire !» Le procureur commence une phrase quand une fille se lève, crête sur le crâne, cinq piercings aux lèvres, deux au sourcil gauche : «Est-ce qu'il peut être défendu par une autre personne qu'un avocat ?»«Ça suffit madame ! siffle la juge. Vous êtes au tribunal et vous venez de couper la parole au procureur ! Cela dit, la loi donne à chacun le droit d'être assisté de qui il veut !» Elle se tourne vers Jean-François : «Monsieur ?» «Bah non, pas elle !» grogne Jean-François. «Madame, vous avez votre réponse ! Et vous, monsieur, je prendrai votre affaire plus tard, avec le temps qu'il faudra pour vous écouter !» conclut le juge et elle réclame : «Les dossiers prêts !» Voilà Emmanuel, 21 ans, serrurier, petite barbe et larme à l'oeil. «Tristement banal, remarque la juge. Lo