Maryse Tripier est professeur émérite de sociologie à l'université Paris-Diderot, auteur avec Andrea Rea de Sociologie de l'immigration (éd. La Découverte, 2003). Elle a participé au forum organisé par le réseau Terra et plusieurs associations de chercheurs en sciences humaines (lire ci-dessous). Elle analyse la posture de Nicolas Sarkozy face aux questions d'immigration.
Pour vous, la création d'un ministère dont l'intitulé associe immigration et identité nationale n'intervient pas aujourd'hui par hasard.
Elle institutionnalise une forme de lepénisation des esprits à laquelle participent de nombreux médias depuis vingt ans sur fond de très forte dérive populiste. L'immigré, c'est l'«autre», forcément dangereux, menaçant. Elle instaure une logique unilatérale de tri entre les «bons» et les «mauvais» immigrés, voire les «bons» et les «mauvais» Français (enfants d'immigrés, par exemple). La vision de la nation est totalement figée et ethnicisée. Elle préexisterait, fixe et homogène, et ne serait pas agitée de conflits internes, de combats qui la construisent. Or nul Etat ne peut en donner la définition. D'ailleurs les immigrés ne s'intègrent pas à un objet abstrait mais dans les milieux populaires.
Ne faites-vous pas un procès d'intention à Nicolas Sarkozy ?
Pour moi la ligne jaune a été franchie avec les expulsions d'enfants. Brice Hortefeux, lui aussi, annonce un chiffre d'expulsions en 2007 et 2008 et contredit par avance l'analyse «au cas par cas». Il rend institution