Les psys sont en colère et l’objet de leur ressentiment porte un nom : Nicolas Sarkozy. On les comprend, à beaucoup d’égards. Réagissant à un fait divers tragique, le Président a annoncé des mesures de «fermeté» qui renversent un mouvement ancien d’humanisation des soins psychiatriques. Du coup, la profession s’inquiète.
Pour autant, elle aurait tort de se focaliser sur le seul Nicolas Sarkozy. D’abord, parce que la mort d’un étudiant grenoblois, comme le montre notre enquête, n’était pas une fatalité. Plusieurs erreurs expliquent le défaut de surveillance d’un patient connu pour sa dangerosité, dont l’état chronique aurait dû inciter à une élémentaire prudence. Il est logique de les pointer du doigt.
Ensuite, parce que l’Etat n’est pas seul coupable dans le mauvais fonctionnement de la psychiatrie française. Le nombre de praticiens n’a jamais été aussi élevé : la majorité d’entre eux passent dans le privé, laissant le secteur public démuni. Aussi bien, c’est le regard de la société tout entière sur la folie qui est en cause. On s’est beaucoup moqué des mouvements antipsychiatriques qui voyaient dans les marges la vérité d’une société et plaidaient pour la fin de l’enfermement. Ils avaient en tout cas un mérite : obliger l’opinion à changer son regard sur la folie et inciter au respect à l’égard d’individus différents. Cette période de découverte et de progrès s’est étiolée. De nouveau, on voit dans ces pathologies avant tout une source d’insécurité et un motif de relégation