EMMANUEL FABER Directeur général délégué (Danone)
Les modes de production de nos sociétés occidentales, caractérisés par la prépondérance du salariat, dans des organisations grandes et complexes, ont pour une large part dépossédé les acteurs individuels de leur capacité à définir et faire évoluer de façon autonome leur rapport au travail. L’expression, saisissante, de «demandeur d’emploi» démontre que c’est le travail lui-même qui a ainsi été aliéné. Par ailleurs, on a assisté à une surspécialisation des tâches, accroissant les compétences nécessaires pour maîtriser les techniques mises en œuvre. De ce fait, l’accès au «marché de l’emploi» s’est trouvé complexifié et le travail est devenu un facteur évident de ségrégation. Voire d’exclusion, car ces mêmes logiques de production «fabriquant socialement de l’envie», elles en font, en tant que source unique de revenus, un facteur incontournable d’intégration sociale. Enfin, l’opposition entre «temps de travail» et «temps libre», apparue récemment à l’échelle de l’histoire humaine démontre la déstructuration complète du rapport entre l’homme et le travail, issue du détournement dans la pensée sociale et politique, de la vocation du travail humain. Ainsi réduit à sa seule fonction de pourvoyeur des moyens de «l’avoir», nous cherchons à en limiter le temps, alors qu’il est, dans sa fonction anthropologique, le principal lieu de croissance de «l’être» : véritable processus d’humanisation, de l’homme soi-même et de