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Libération
TRIBUNE

Forte avec les faibles, faible avec les forts…

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par Corinne Lepage et Jean de MAILLARD, Vice-président du tribunal de grande instance d’Orléans
publié le 14 janvier 2010 à 0h00

Portés aux nues en 1989 quand Thierry Jean-Pierre perquisitionnait le bureau d’études du Parti socialiste, l’une des boîtes noires de la corruption politique française, les juges sont devenus les parias de la République quand la commission parlementaire d’Outreau a publié son rapport en 2006. Ils ne méritaient ni tant d’honneur, ni tant d’indignité. Leur descente aux enfers est la conséquence des scléroses de l’appareil judiciaire autant que de la vindicte des élites politiques qui savouraient ainsi leur tardive revanche. L’année 2010 devrait être celle du coup de grâce, si la mise à mort du juge d’instruction voulue par le président de la République voit le jour.

L’affaire ne date pas d’hier. En vingt ans, tout a été entrepris pour briser ses minces velléités d’émancipation. On doit à Elisabeth Guigou, alors garde des Sceaux, les premières mesures efficaces qui ont permis d’étouffer la magistrature après une décennie de trop grande audace. Deux séries de mesures ont suffi à reformer ses rangs : jouant sur un ressort toujours efficace, elle a mieux payé les magistrats et restauré leur hiérarchie pour qu’elle tienne en mains ses troupes. Nul besoin de se fâcher : il a suffi d’introduire dans les carrières une mobilité obligatoire. Les juges en CDD incarnent désormais la conception française de l’indépendance judiciaire. Pour les postes les plus stratégiques - Paris étant au cœur, bien sûr, de ces enjeux de pouvoir - un ballet de courtisans se livre à une surenchère de discrète