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Libération
Interview

«Il faut démythifier la vie des trafiquants»

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Qui sont les trafiquants de drogue en France, combien gagnent-ils, que revendent-ils? Etat des lieux avec Michel Gandilhon, de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies.
par RECUEILLI PAR WILLY LE DEVIN
publié le 29 avril 2010 à 16h02
(mis à jour le 29 avril 2010 à 18h26)
Michel Gandilhon est chargé d’études à l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT).

Que sait-on de l’état actuel du trafic de drogue en France?

Les dernières études réalisées montrent presque toutes la même chose: d'abord, la résine de cannabis reste le produit numéro un en France. La consommation annuelle de cannabis dans l'Hexagone se chiffre entre 200 et 300 tonnes, et génère un chiffre d'affaires global pour les filières d'environ un milliard et demi d'euros, ce qui n'est pas négligeable. Ensuite, nous assistons de façon certaine à un essor de la cocaïne et à une résurgence de l'héroïne, notamment dans les banlieues défavorisées.
Comment expliquer ce retour en force des drogues dures? Cela tient en premier lieu au repositionnement géopolitique du trafic. A la fin des années 90, le marché américain de la cocaïne est arrivé à saturation. Les principaux producteurs ont donc établi de nouvelles routes afin de vendre leurs produits. 30% de la cocaïne consommée en France transite désormais par l'Afrique de l'Ouest. Sa route épouse maintenant celle du cannabis.

La conséquence de ce réajustement d’ampleur mondiale, c’est que les filières françaises ne sont plus monocartes – elles ne véhiculent plus un seul produit –, mais multicartes. L’autre explication se trouve tout simplement dans l’effondrement du prix de la cocaïne. En dix ans le prix gramme de cocaïne est passé de 150 euros à 60 euros soit moitié moins. La cocaïne s’est considérablement «démocratisée». Cocaïne comme héroïne concernent désormais des milieux très hété