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Libération
Reportage

«La misère blonde aux yeux bleus»

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Au collège Martin-Luther-King de Calais, les adultes déplorent les conditions de vie des familles.
publié le 30 avril 2010 à 0h00
(mis à jour le 3 mai 2010 à 12h39)

«Un gamin m'a dit : "Jette-le, Julie, ça va péter !"» Julie Somers, assistante d'éducation, a lâché les bouteilles juste avant qu'elles n'explosent. C'était vendredi dernier, à la fin de la récréation, au collège Martin-Luther-King de Calais. Deux ados ont jeté deux bouteilles remplies d'acide chlorhydrique et de morceaux d'aluminium par-dessus les grilles. «Une détonation superforte. Sans le gamin, ça m'aurait sauté au visage.» Lundi, les professeurs et le personnel ont exercé leur «droit de retrait», invoquant le «danger», pour les élèves, et pour eux. Les deux ados de 15 ans en cause, dont un scolarisé au collège, ont été placés en garde à vue, puis mis en examen pour «fabrication d'engins explosifs et violences aggravées».

Débrouille. Le collège Martin-Luther -King, en dispositif prévention violence et ambition réussite, est en lisière du quartier du Beau-Marais, zone urbaine sensible de Calais. Des tours de plus de dix étages, des parkings défoncés, des cages d'escalier indignes. Mais pas de «jeunes issus de l'immigration», parce que pas d'immigrés, ou quasi. Juste des pauvres. Un jeune prof résume : «Ici, c'est la misère blonde aux yeux bleus.» A l'enquête sociale, le collège Martin-Luther-King a été classé dernier du Pas-de-Calais. Dans le collège, c'est 89 % d'élèves de familles défavorisées, 40 % de familles sans père, 2,5 % de familles d'origine étrangère, et 40 % de chômage. Il est loin le temps des ouvriers de l