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Libération
interview

«La recherche d’une apothéose collective»

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Monique Dagnaud, chercheuse à l’EHESS, analyse un phénomène qui déconcerte les pouvoirs publics :
publié le 14 mai 2010 à 0h00

La sociologue Monique Dagnaud, directrice de recherche à l'EHESS, est l'auteure de la Teuf : essai sur le désordre des générations (édition du Seuil, 2008).

D’où vient cette nouvelle frénésie pour les apéros géants ?

Ces rassemblements s’inscrivent dans une culture festive débridée qui s’est développée au début des années 2000. Ils se situent au croisement de la culture Facebook, qui implique d’avoir le plus grand nombre d’amis, et de la fête étudiante. Par-dessus cela, on assiste au détournement d’un rendez-vous bien ancré dans la culture française : l’apéro. Ajoutez-y la formidable puissance virale de Facebook et vous obtenez ces grands rassemblements, organisés dans les centres-villes et regroupant toutes les classes sociales. Les apéros géants, c’est l’esprit d’un réseau virtuel traduit dans la vie réelle.

Que cherchent les participants ?

Leur objectif affiché est de créer un fort bruit médiatique en lançant une compétition entre les différentes villes de France. Derrière cela, il existe une aspiration plus profonde : la recherche d’une apothéose collective. Les jeunes veulent vivre au présent plutôt que de se projeter vers un avenir qui pourrait laisser pessimiste. Les apéros géants permettent aussi aux adolescents et aux post-adolescents de rappeler au monde des adultes qu’ils existent. Pour s’en assurer, ils se réunissent dans les centres-villes et mentionnent longtemps à l’avance leur lieu de rendez-vous. Finalement, c’est l’inverse des rave parties, qui, elles, se déroulent sur des terrains désaffectés à la campagne, dont l’emplacement reste secret j