Il n'y a pas de dieu des ivrognes, sauf pour le capitaine Haddock. Si on peut sauver ne serait-ce qu'une seule vie en interdisant les apéros géants, il faut les interdire. Mais est-ce si simple ? Le mot même d'apéro, diminutif populaire du protocolaire et historique «apéritif» censé ouvrir l'appétit avant le repas, est chargé en France d'une séduction qui n'a d'égale que sa banalité : c'est un appel puissant et anodin, qui change les postures et les manières. Le verre est levé avant le coude, les sourcils aussi. Ce n'est pas de l'eau qui s'offre, bonne que pour se laver les pieds, disait mon grand-père. En France, c'est l'alcool qui reste nécessaire à l'idée d'apéro , dont le héros au premier rang est un homme, un vrai, qui sait «lever son verre comme les autres» comme dit la chanson.
Un véritable apéro est court car il précède autre chose qu'il annonce, et celui du vendredi soir qui annonce le week-end est plus joyeux que celui du dimanche soir. Et si «la valeur des grandes vacances tient à la vacance des grandes valeurs», comme l'a écrit Edgar Morin, c'est surtout au moment de l'apéro, offert l'été tous les soirs dans les campings et sur les terrasses, que l'on s'en console. En plein hiver gris, déjà le simple mot - on dirait le Sud - rappelle que l'été existera.
En choisissant génialement ce terme d'apéro, les initiateurs de Facebook ont produit un effet de séduction puissant adressé à tous les âges, à toutes les familles politiques non r