La «Jeanne» raccroche. Lorsqu'elle accostera cet après-midi dans le port militaire de Brest, le pacha prononcera pour la dernière fois le traditionnel : «Terminé barre et machines.» Ce sera fini. Le navire- école de la Marine nationale va être désarmé après quarante-six ans de service sur les mers du globe.
Construite au début des années 60, la Jeanne-d'Arc est un vieux bateau - imaginez que vous rouliez encore en Renault 16 ou en Peugeot 204 - avec quelques kilomètres au compteur : 3,15 millions, l'équivalent de 80 tours du monde. Les marins et les mécaniciens ont eu fort à faire, surtout ces dernières années. Et, du coup, ils se sont payés de petits plaisirs sur le chemin du retour. Des pointes de vitesse. Dans la nuit de mardi au mercredi, au large du Cotentin, le porte-hélicoptères a filé 29,4 nœuds - près de 55 km/h.
Depuis six ans, pour économiser le potentiel de ses machines vieillissantes, la Jeanne n'utilisait plus que deux de ses quatre chaudières. Ce mode dit de «croisière» limite la vitesse à 18,5 nœuds, mais en réalité la Jeanne ne poussait plus au-delà d'un petit 15 nœuds (28 km/h).
Le 29 avril dernier, premier essai de vitesse. La Jeanne était dans l'Atlantique entre Saint-Pierre-et-Miquelon et La Corogne (Espagne). Cap au 90, plein ouest, mer belle, petite houle arrière. Elle passe en «mode principal». Les mécaniciens - surnommés les «bouchons gras» - sont aux petits soins. «Soudain, raconte un marin, le