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Libération
Interview

«L’excès d’autoritarisme des pères d’Afrique sahélienne»

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Hugues Lagrange, auteur du «Déni des cultures» :
publié le 27 septembre 2010 à 0h00

Hugues Lagrange qui publie le Déni des cultures est sociologue chercheur au CNRS. Il est également professeur à Sciences-Po Paris.

«Ces émeutes [celles de fin 2005, ndlr] ont mobilisé les jeunes Noirs», écrivez-vous. Et : «les jeunes issus des migrations africaines sont au cœur de ces explosions de violence». Ne liez-vous pas ainsi immigration et délinquance ?

Même si c’est l’une de mes conclusions, je n’ai pas envie que l’on se focalise sur le seul aspect d’une délinquance plus forte des jeunes issus des migrations africaines, à milieu social égal. C’est un aspect qui est quelques fois mal compris parce qu’on cherche à l’attribuer aux soi-disant caractéristiques d’une culture africaine, qui serait, en tant que telle, facteur de délinquance. A mon sens, il ne s’agit pas de cela. On ne mesure jamais assez le fait que l’immigration, c’est le déplacement de populations qui ont leurs traditions et leurs cultures, dans un autre système culturel. Le problème tient aussi aux conditions d’accueil ou d’insertion dans la société française. J’ai écrit plusieurs fois, dans mon livre, le mot «accueil» avec des guillemets, car il se résume plutôt à «fous le camp».

Vous mettez particulièrement en cause les familles originaires du Sahel, pourquoi ?

Tous les groupes sociaux ne paient pas le même tribut à la délinquance, ni tous les groupes culturels. L’enjeu de l’analyse est de comprendre pourquoi, à milieu social comparable, on trouvera en moyenne plus d’auteurs de délits parmi les garçons issus des familles du Sahel que dans les familles venues, par exemple, du golfe de Guinée.

Et pourquoi ?

S’agissant des adolescents dont les familles sont venues d’Afrique sahélienne, le problème réside dans un excès d’autoritarisme des pères. Or, ces mêmes pères ne peuvent cacher aux yeux de leurs fils qu’ils ont passé un