Russe, française, apatride et juive : c'est autour de ces quatre épithètes que s'organise la passionnante exposition consacrée par le Mémorial de la Shoah à Irène Némirovsky, romancière dont l'œuvre a été redécouverte en 2004. Suite française, couronné du prix Renaudot à titre posthume, valut à son auteure une notoriété internationale - deux millions d'exemplaires s'en seraient vendus en anglais.
Classeur. Outre l'intérêt documentaire du livre - un témoignage sur l'effondrement de la société française dans le contexte de l'exode et de la défaite -, sa fortune doit beaucoup aux circonstances dans lesquelles il a été conservé. Lors de son arrestation, le mari de la romancière confia à leur fille, Denise Epstein, une valise qui contenait le manuscrit, lui recommandant de ne jamais s'en séparer. Pareilles circonstances justifiaient pleinement l'organisation d'une telle exposition au Mémorial de la Shoah, et la présentation, pour la première fois au public, du classeur couvert de l'écriture minuscule d'Irène Némirovsky, document dont la préservation représente une forme de victoire symbolique contre l'oubli.
Mais l'intérêt de l'exposition ne se limite pas à ce qui en constitue, d'une certaine façon, la pièce maîtresse. Son titre, un propos d'Irène Némirovsky «Il me semble parfois que je suis étrangère», interroge la difficile question de l'identité. Née à Kiev en 1903 dans une famille juive, Irène Némirovsky quitta la Russie, avec les siens, pour s'insta