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Libération
TRIBUNE

La Révolution élisait ses juges

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par Hervé Leuwers, Professeur d’histoire moderne, université Lille-III
publié le 15 octobre 2010 à 0h00

En juin, Michèle Alliot-Marie s'en prenait à ce qui reste d'une innovation judiciaire majeure de la révolution constituante - le jury criminel - en s'interrogeant sur l'opportunité de son maintien intégral. D'une certaine manière, Brice Hortefeux lui a répondu dans un entretien remarqué dans le Figaro du 18 septembre, en proposant l'élection des juges d'application des peines, voire des présidents de tribunaux correctionnels, et l'introduction de jurés populaires au correctionnel ou, à défaut, la mise en place d'un système d'échevinage associant jurés et juges professionnels !

Place Vendôme, on se méfierait des citoyens-jurés ? Place Beauvau, on regretterait le manque d'emprise du peuple sur la justice ? L'opposition n'est sans doute que dans la méthode et dans le discours. L'essentiel, affirme Brice Hortefeux, est que la justice fasse son travail ! Dans les propos du ministre, qui propose également d'élargir le système des peines de sûreté et un durcissement des aménagements de peine, le passage consacré à l'élection des juges surprend. La démonstration n'est-elle pas renforcée d'une référence à notre principale Révolution, celle de 1789 ? Presque lyrique, Brice Hortefeux rappelle que, «pour rompre avec l'Ancien Régime», les constituants ont décidé l'élection de «certains juges». Voici donc des garants de poids : les «pères» de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen devenus, sur le site du ministère, par un américanisme sans doute révél