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grand angle

Quand le roi pardonnait

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En 1449, un meurtre dans l’aristocratie pose déjà le problème de l’indépendance des juges face au pouvoir royal. Droit, grâce, vengeance : une justice en chantier.
par Claude Gauvard, Professeur émerite à Paris-I
publié le 15 octobre 2010 à 0h00

ans la soirée du 9 mars 1449, au château de Nesles-en-Tardenois, dans l’Oise, Guillaume de Flavy, au lit et sans défense, tombe sous les coups de deux tueurs à gages, un barbier et un homme d’armes. Le crime a été fomenté par sa jeune épouse, Blanche d’Overbreuc, avec la complicité de son amant, Pierre de Louvain. Elle aurait assisté à la scène et achevé son mari, l’étouffant avec un oreiller. Quelques jours plus tard, les deux complices convolèrent en légitime mariage.

L'affaire est exceptionnelle, et d'autant plus grave que la victime est un capitaine du roi, qui gouverne la ville de Compiègne en son nom, même s'il a pris de grandes libertés. Son meurtre est considéré comme un crime de lèse-majesté puisque les capitaines royaux sont «en la sauvegarde royale». Attaquer un officier revient à détruire une «partie du corps du roi». Le crime de lèse-majesté est un chef d'accusation qui se développe en ces deux derniers siècles du Moyen Age, au moment où la souveraineté du roi s'impose. L'affaire est donc portée au tribunal royal suprême, le Parlement de Paris. Il fait partie des institutions qui se sont développées au cours du XIIIe siècle, en particulier sous le règne de saint Louis (1226-1270), en prenant de plus en plus d'autonomie par rapport à la cour du roi. Par le droit d'appel, le Parlement est devenu maître de la justice que le roi délègue à ses juges pour les «affaires civiles», mais aussi certaines affaires criminelles.

Rémission et lettres de grâce

Il est donc normal que le Par