En octobre 2005, il y a juste cinq ans, éclataient les émeutes urbaines, perçues à juste titre comme le cri de révolte et de désespoir de la jeunesse reléguée et stigmatisée des quartiers populaires périphériques. Et cela fait cinq ans que l’on croit tout savoir sur le jeune de banlieue. On a tout lu, tout vu, tout entendu. Il a été analysé, observé, filmé, croqué, interviewé jusqu’à satiété. La couverture médiatique a été à la mesure de l’ampleur du soulèvement juvénile et, finalement, à son image : massive et inaudible. Massive : 1 260 000 résultats en 0,41 seconde pour l’occurrence «jeune de banlieue» sur Google.fr. Inaudible, car catégoriser la jeunesse de ces quartiers sous cette seule appellation d’origine contrôlée n’a pour seul effet que de renforcer le pouvoir simplificateur et rassurant du stéréotype.
A travers mon expérience de «prof de banlieue» au lycée - encore un autre stéréotype - je n'ai jamais rencontré le jeune de banlieue dont on me parle tant. Par contre, j'ai travaillé à Drancy, à Saint-Denis, à Stains et à Aubervilliers avec Aminata, Boris, Clarissa, Daniela, Elena, Fatiha, Gil, Hicham, Ikhlef, Jamila, Kevin, Larissa, Mansour, Nawelle, Ophélie, Pedro, Quin Yuan, Rajan, Sekou, Tatiana, Umit, Vinelson, Walid, Xiang, Yamina, Zohair et bien d'autres. J'ai vu des élèves lutter contre la force des déterminismes (culturel, social, économique et spatial) qui structurent leur condition commune, mais avec des armes individuelles et singulières, un passé scolaire