Epidémiologiste à l'Institut Gustave-Roussy de Villejuif (Val-de-Marne) et spécialiste du cancer, Catherine Hill a mené en novembre 2010, à la demande de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), une étude sur la mortalité du Mediator. Elle confirme pour Libération son estimation de 500 décès en France, et réfute catégoriquement le chiffre de trois morts avancé mardi par Jacques Servier devant ses salariés.
Quelle est votre réaction au chiffre de trois décès liés au Mediator avancé par Jacques Servier ?
Ils sont complètement à côté de la question. Il s’agit d’une incompréhension totale des méthodes utilisées en épidémiologie. Ceci dit, leur raisonnement ne m’étonne pas. Je pense qu’ils ne prennent en compte que les morts dits «imputables» au Mediator. Ils se basent sur les cas de valvulopathies signalés aux autorités par les médecins, et les examinent pour écarter les patients dont le décès a pu avoir une autre cause. En raisonnant ainsi, cela ne m’étonne pas qu’on arrive au chiffre de trois morts. Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg ! Ce n’est pas comme cela qu’il faut faire.
Pourquoi contestez-vous la méthodologie qu’aurait employée Servier?
L’imputabilité est utilisée en pharmacovigilance, lorsqu’on ne sait pas encore si une pathologie est liée à un médicament. A ce moment-là, il est utile de rechercher et d’examiner des cas isolés. Mais lorsqu’on a la preuve, comme c’est le cas aujourd’hui, que le Mediator augmente le risque d’atteinte des valves du cœur, et que ce risque supplémentaire est chiffré, on calcule alors de façon statistique le nombre de morts dits «attribuables» au médi