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Libération

L’impossible justice d’exception

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Dans les archives de «Libé», il y a douze ans. Accusés d’homicides involontaires, trois ministres sont jugés. Après trois semaines de procès, peu à peu déserté par les victimes, ils sont peu ou pas condamnés.
publié le 26 février 2011 à 0h00

On le savait, on le pressentait, on le redoutait. Le procès risquait d'être impossible. Mais on espérait. La Cour de justice de la République était atteinte de plusieurs défauts génétiques, constitutifs, identifiés. Cependant, l'incertitude de l'audience, ses surprises, le talent, l'intelligence de ses juges pouvaient encore la sauver. Ce n'aura pas été le cas. «Une psychothérapie collective», voilà quel était l'enjeu de ce procès pour Roger Lucas, tel qu'il l'exprimait mardi. Un «malentendu», probablement.

La mécanique mal huilée de cette juridiction d'exception, taillée sur mesure en 1993 pour satisfaire deux exigences contradictoires, pouvoir juger des ministres tout en les protégeant des excès, a manifesté ses limites. Ce constat, les victimes l'ont fait rapidement : elles ont peu à peu déserté l'audience. Ce constat, certains magistrats professionnels et expérimentés l'ont également fait, venant assister aux audiences, anonymes, dans la salle réservée au public. Pour avouer leur «honte» au sortir des débats. Ce constat, les avocats des ministres ne l'ont pas fait publiquement. Mais certains d'entre eux ont pris la précaution de faire noter au greffier toutes les incongruités juridiques, atteintes aux droits de la défense auxquelles on a assisté.

La relaxe demandée pour les trois ministres par le parquet général n’est pas choquante en soi. Elle l’est parce qu’elle s’appuie sur un débat appauvri, tronqué. Mais, et il faut le souligner, la condamn