On rêverait de voir un cinéaste arpenter les rues de nos villes et enchaîner, dans la bande-son d’un film, tous les univers musicaux que les marcheurs emportent avec eux dans leurs écouteurs. On aimerait savoir, là tout de suite, quelle ambiance ils transportent, comme on se demande souvent quel est ce livre qu’on aperçoit dans les mains d’un voyageur du métro.
Les urbains d’aujourd’hui se déplacent avec leur monde. A toute cette intimité qu’un simple sac transportait - une pièce d’identité, des clés, trois photos des enfants, une carte de paiement, un journal - s’ajoutent le téléphone mobile dernière génération et quelques autres outils électroniques nomades. On avait pris l’habitude, bon gré mal gré, d’entendre tous ces fragments de vie privée chipés au fil des parlottes téléphoniques de la rue. Désormais, on voit aussi des images. Parfois, dans un McDo ou un Starbucks, apparaît sur l’écran d’un ordinateur portable le visage de quelqu’un. Il parle à cet autre qui est là, traîne depuis une heure sur un cappuccino et profite du wi-fi gratuit pour une longue conversation vidéo. Ils sont loin et proches à la fois, et dans ce décor de la cité moderne, on a attrapé en passant un peu de leur vie.
La «ville numérique», comme disent les spécialistes, est celle où réseaux et ondes permettent de parler, d'acheter, de s'informer, d'échanger en se déplaçant. Comme l'écrit Thierry Paquot, dans le dernier numéro de la revue Urbanisme,«le piéton branché a accès en temp