Cela s'appelle l'Inhabitable, et le mot est faible. C'est une réalité qui arrive près de chez vous, dans des immeubles en ruine devant lesquels on passe sans les voir. L'habitat insalubre, cette indignité, est le sujet d'un petit livre qui, conformément à la règle de la collection «Mémoires urbaines Paris XXIe siècle», réunit un écrivain et un architecte.
A la romancière, Joy Sorman, le récit de l’état des lieux. Elle arpente les passages, les cours, monte les escaliers branlants, décrit les murs crasseux, les planchers déglingués, les habitats bricolés. Elle détaille les fenêtres bouchées au carton pour isoler un peu, les branchements électriques dangereux, l’entassement des choses et des gens. Un reportage photo de Jean-Claude Pattacini donne cette réalité à voir.
Amine et Ziane, trente ans dans la misère, appréhendent le relogement. «Etre relogé, c'est vivre séparé de cette fratrie instituée dans la crasse et l'humidité», écrit l'au-teure. Les intéressés le disent à leur manière : «Ici, on est bien et malheureux.»
Dans une famille chinoise, les enfants absorbent les poussières de la peinture au plomb. Ils sont «toujours malades ces gosses, toute l'année», dit l'infirmière de la Siemp, société chargée de la résorption de cet habitat insalubre. Les adolescentes qui vivent là sont pomponnées, «belles pépées aux silhouettes découpées sur fond de mur sale rongé par les cafards». Il faut survivre.
On voit, dans ces pérégrinati