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Libération
grand angle

Arsenic et vieilles bouteilles

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Une belle-famille étouffante, un mariage qui s’étiole… : pendant plusieurs mois, Jacky, viticulteur à Chablis, a mélangé la soupe de Josyane à de l’arsenic. Elle en a réchappé. Il était jugé cette semaine.
publié le 11 mars 2011 à 0h00

C’est un crime à l’ancienne, perpétré dans un monde de jadis. Un crime rare, avec une victime affaiblie, mais en vie. Une tentative d’empoisonnement à l’arsenic, jugée cette semaine par la cour d’assises de l’Yonne, à Auxerre, devant un public de gens qui vivent de la vigne, souvent rien que pour elle. Prévenu et libre, Jacky Châtelain, 52 ans, viticulteur à Fontenay-près-Chablis, 160 habitants, a comparu pendant deux jours. Ce petit chauve à lunettes, au débit lent et à l’accent indéfini, a la main droite saisie d’un tremblement intempestif.

Face à lui, immobile sur le banc des parties civiles, son ex-femme, Josyane de Oliveira, viticultrice de 50 ans, qu’il est accusé d’avoir voulu tuer. Vêtue de noir, chevelure châtain, elle a l’air triste. Parfois, elle lève les yeux au ciel, incrédule lorsque son ex-mari parle.

Pendant plusieurs mois, fin 2004, plusieurs fois par semaine, Jacky a versé, à l'heure du dîner, de l'arsenic dans la soupe aux légumes et les yaourts de son épouse. Au sous-sol de l'exploitation, il prenait quelques gouttes du «produit» dans un bouchon rouge et il badigeonnait l'assiette avec un sopalin. Jacky se servait dans la remise de la propriété viticole dans un bidon blanc de dix litres perché sur une étagère. Les viticulteurs connaissent bien le «Pyral Rep Fort». Un produit interdit depuis 2001, mais qui n'a pas été retiré des appentis. Une tête de mort dessus et des grosses lettres : «Traitement d'hiver de la vigne en pulvérisation». En plus