C'était sa dernière salve avant la retraite. Après six ans à la tête du parquet général près la Cour de cassation et quarante-quatre années d'exercice professionnel, Jean-Louis Nadal a frappé fort.
Invité ce vendredi à discuter sur le thème «le pouvoir de la Justice» à l'occasion des deuxièmes entretiens du Jeu de Paume organisés au château de Versailles, le premier procureur de France s'en est pris aux orientations actuelles de la politique judiciaire.
«La justice a été littéralement jetée dans le débat politique lors des élections présidentielles de 2002, a-t-il fait valoir. L'exploitation - faut-il dire la surexploitation? - du thème de l'insécurité, la dénonciation chronique du prétendu laxisme des juges, les contradictions dans lesquelles on enfermait l'opinion en la prenant à témoin du malheur des prisons tout en reprochant aux juges de ne pas assez les remplir, tout cela a été dévastateur pour l'institution.»
Le verbe est haut. Le discours tranche avec la réserve de ses pairs. Et arrache de nombreux rires à l'assistance.
S'il concède que «la justice a été brocardée de tous temps», la situation actuelle est selon lui d'autant plus inquiétante qu'«il y a un changement profond de nature quand l'attaque [...] (vient) des responsables politiques eux-mêmes».
Indépendance
Sur le long terme, Jean-Louis Nadal estime néanmoins que «nous sommes entrés, qu'on le veuille ou non, dans ce moment de l'histoire où l'autorité judiciaire est en passe de se muer en