«Tout va bien ? Je peux continuer ?», interroge Pierre-Yves, craie à la main devant le tableau noir. Les douze élèves, assis dans la salle Beckett de l'ENS (Ecole normale supérieure) de la rue d'Ulm, à Paris (Ve), approuvent silencieusement. Ils ont chacun devant eux un exemplaire de Gargantua. La veille, Pierre-Yves, leur «tuteur», étudiant à Normale et agrégé d'anglais, leur a demandé de relire le prologue et, manifestement, tous l'ont fait.
«Rabelais fait des énumérations parataxiques, poursuit Pierre-Yves. Vous savez ce qu'est une parataxe ? Un enchaînement sans lien de coordination. Maintenant, nous allons étudier l'esthétique carnavalesque. Qu'est-ce qu'un carnaval ?» Des mains se lèvent. «Il y a le carnaval de Rio»,«celui de Venise»,«c'est une fête»,«en costumes»,«une parade dans les rues»… Les élèves, dont un seul garçon, entrent en terminale L. Tous sont venus volontairement une semaine à l'ENS afin de préparer leur rentrée. Ils ne perdent pas une goutte du cours. Et quand Pierre-Yves aborde les différents registres du récit - dramatique, tragique, pathétique… -, les mains se lèvent à nouveau.
Dérivés. Dans la salle au-dessus, ils sont dix de terminale S à plancher sur les dérivés. Erwan, leur tuteur normalien, traverse la salle à grands pas, en s'arrêtant à des points A, B, etc. Les élèves sourient de le voir gesticuler. Mais, très vite, ils se concentrent et notent la