«Si Lilia voulait devenir médecin, bien sûr je ne serai pas contre ! Ce serait même ma fierté. On dirait alors : regardez, une fille d'immigrés, avec un père illettré en français…» Mohamed Aouissi est père de quatre enfants. Sa fille aînée Lilia, 16 ans, est en première S (scientifique). Il a beau assurer qu'elle choisira plus tard ce qu'elle veut faire, il place de grands espoirs en elle. «On compte bien que nos enfants feront mieux que nous», dit-il. Avec le père, sans emploi, et la mère Nadjette, surveillante de cantine scolaire et animatrice le mercredi, la famille habite un trois pièces dans un HLM à deux pas du métro Barbès-Rochechouart, à Paris. Les trois grands partagent une chambre, les parents occupent l'autre avec la petite dernière, Chahine, 6 ans et demi. Pour faire ses devoirs, Lilia s'installe sur la table de la salle à manger aux murs blancs décorés par de grandes photos de la famille - les enfants posant face à la caméra, les grands-parents en pèlerinage à La Mecque - et par un tableau avec un verset du Coran.
Pression. Nadjette a apporté du thé à la menthe et un gâteau au chocolat sur la table basse du salon. Elle ne rate pas une réunion à l'école de chacun de ses enfants. Le second, Nourdine, l'inquiète un peu car il n'est pas assez accrocheur en classe. «Lilia nous a dit que le bac, c'était dans la poche, glisse-t-elle, alors on fait confiance.»
Toute menue, amaigrie après le ramadan, Lilia laiss