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grand angle

Oradour-sur-Glane Profession rescapé

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A 86 ans, Robert Hébras est l’un des deux derniers témoins du massacre du 10 juin 1944 et accueille, inlassablement, les visiteurs du village martyr. Il est au cœur d’un documentaire.
publié le 29 septembre 2011 à 0h00

Il vit au milieu de ses ruines. Il les arpente, il les connaît. Il les commente, il en transmet le souvenir aux gens qui viennent les voir. Elles l'entourent, elles sont devenues sa raison d'être. Robert Hébras, 86 ans, impeccablement habillé d'un costume et de mocassins noirs, avance doucement dans ce qui reste de son village d'Oradour-sur-Glane, dans la Haute-Vienne. Oradour : plus de 300 000 visiteurs par an. On le suit, longeant les murs, déchiffrant des noms inscrits sur des plaques qui rappellent qui faisait quoi ici. Là, le café central, à côté, le puisatier, puis le tailleur, le coiffeur, le boucher… Les métiers d'un village autrefois animé. «A chaque porte correspondent des visages», dit doucement Robert.

Ses souvenirs pourraient être des cauchemars. Il dit que non. C’est la vie d’avant dont il rêve. Se concentrer sur lui, enfant, et puis adolescent, c’est une manière de conjurer le sort et de faire disparaître le moment où tout a basculé. Le cauchemar, il le raconte chaque jour, en passeur de mémoire. Robert est un des deux derniers rescapés du massacre du 10 juin 1944 (Jean-Marcel Darthout, un peu plus fatigué que lui, a quitté le coin pour habiter Paris).

Cet après-midi de juin 44, la troisième compagnie du 1er bataillon du régiment Der Fürher de la division blindée SS Das Reich a rassemblé les hommes dans une grange, les femmes et les enfants dans une église. Elle a mitraillé, mis le feu, et puis s'en est allée. 642 morts, 300 bâtiments détruit