C'est un débat essentiel, mais il reste à bas bruit : la vieillesse est-elle une maladie ? Faut-il la médicaliser ? La médecine est-elle une chance pour les vieux ? Le professeur Olivier Saint-Jean, chef du service de gériatrie à l'hôpital européen Georges-Pompidou (Paris), a toujours questionné le rôle de la médecine dans le grand âge. Il fait partie du jury qui suit les débats sur la vieillesse organisés par le Centre d'éthique clinique de l'hôpital Cochin, en partenariat avec France Culture et Libération.
Ce qui vient de se passer autour des médicaments anti-Alzheimer - à savoir on continue de les rembourser alors que leur intérêt thérapeutique est nul -, est-ce le symbole de l’ambiguïté autour la médicalisation de la vieillesse ?
C’est en tout cas un très bel exemple de surmédicalisation, faute de savoir penser une médecine différente pour les personnes âgées. Dans la maladie d’Alzheimer, que voit-on ? D’un côté, il y a une tendance à identifier le déficit cognitif, c’est-à-dire les pertes de la personne, puis à essayer de les compenser. De l’autre, on va multiplier les examens, les analyses, faire des ponctions lombaires, lancer des IRM à la recherche d’éventuels marqueurs de maladie. Cela peut avoir du sens en matière de recherche, mais cela ne change en rien la prise en charge de ces malades. Tout cela n’a pas de sens, sauf celui de satisfaire cette logique biomédicale sur la vieillesse qui cherche à s’imposer.
Mais d’où vient cette logique ?
Schématiquement, pendant longtemps, quand ils perdaient la tête, les vieux étaient considérés comme séniles ou gâteux. C’était bien sûr péjoratif, mais ils restaient dans la logique du monde des vivants. Dans les années 70, les vieux déments ont été enfermés dans des services de