Dans la nuit du 25 au 26 novembre 1911, Paul et Laura Lafargue mettaient fin à leurs jours, considérant qu'il était temps d'en finir avant d'être une charge pour les autres. Le premier s'était rendu célèbre pour son Droit à la paresse, la seconde était la fille et la traductrice de Karl Marx. A leur manière, ils n'ont pas voulu voler le bien le plus précieux de tout être capable de sentir et de penser, le temps.
Le combat de Paul Lafargue pour la réduction du temps de travail vient de ce jugement qu'il fera dernier : chacun a le droit d'employer librement le temps plutôt que d'en être l'esclave. En faisant croire aux ouvriers, à l'aide de l'Eglise, que la vie est travail, les capitalistes passent leur temps à voler celui des travailleurs. Ces derniers ne devraient pas réclamer le droit au travail - c'est une erreur masochiste selon Paul Lafargue -, mais le droit à la paresse. Car c'est la possibilité d'employer son temps à ne pas travailler qui est la plus injustement distribuée : les propriétaires peuvent s'y adonner de bien des manières quand les ouvriers triment en servant des machines. C'est l'«amour du travail» qui a causé les plus grandes misères à ceux qui n'ont rien. Ils sont devenus entièrement dépendants du travail qui corrompt l'intelligence et les organismes, qui tue «toutes les plus belles facultés», écrit Paul Lafargue en 1880. Selon lui, la finalité du socialisme sera de répartir le travail et la paresse sans distinction sociale. A chacun d'em