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Libération
Interview

«La justice sociale est une nécessité»

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Jean-Fabien Spitz, professeur à Paris-I, analyse la construction et le devenir du projet républicain à la française.
publié le 27 janvier 2012 à 0h00

Professeur à l'université Paris-I, Jean-Fabien Spitz est l'un des meilleurs connaisseurs philosophique de la République. Il est notamment l'auteur d'un livre important sur la question publié en 2005, le Moment républicain (Gallimard) mais aussi le traducteur de philosophes anglo-saxons du courant républicaniste comme Philippe Pettit. A la veille des Etats généraux de Libération à Grenoble autour de «Vivre la République !» et auxquels il participe, il nous a accordé un entretien.

Dans un ouvrage important, vous avez isolé un «moment républicain» en France, quel est-il ?

Il s'agissait d'éviter la réduction de l'idée républicaine à la laïcité. A la fin du XIXe siècle, le projet républicain a consisté à conférer une légitimité solide à un régime de libertés individuelles en montrant aux classes populaires que celui-ci pouvait prendre en compte leurs intérêts et que le libéralisme ne se réduisait pas à un marché qui les condamnait à la paupérisation. Il s'agissait donc d'un programme d'intégration sociale par la justice, fondé sur l'idée que la création de richesses rendue possible par l'indépendance des acteurs économiques est une œuvre collective et qu'on ne peut raisonner en tentant de «récompenser» chacun pour sa contribution. Une société des individus, en ce sens, n'est viable que si l'on assume les risques en commun et si la puissance publique veille à une relative continuité des conditions. C'était l'ambition des lois sociales sur la durée du travail, sur l'assurance vieillesse, sur le droit syndical puis, avant la Première Guerre mond