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Libération
TRIBUNE

Main basse sur les victimes

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par Benoist Hurel
publié le 16 février 2012 à 0h00

Les hold-up les plus fascinants sont ceux qui passent longtemps inaperçus. A cette aune, la façon dont le pouvoir actuel a fait, depuis près de dix ans, main basse sur la condition, la souffrance et la représentation des victimes relèverait du grand art si la manière n’avait pas été aussi indigne.

Ce n'est pas la légitime préoccupation pour le statut des victimes qui est en cause, mais bien l'instrumentalisation de leur sort toujours injuste et émouvant au profit d'une fortune politique. La «rhétorique de la peur» a su se montrer efficace. Enrôlant de force chaque citoyen sous une bannière fédératrice au nom de laquelle «nous sommes tous des victimes potentielles», le chef de l'Etat pouvait à loisir se repaître de ce monde où des Français «baissent le regard dans la rue, verrouillent leur porte à triple tour, vivent la peur au ventre», un monde «de vies brisées, mutilées, de familles détruites». Peu lui importait que le constat méritât mieux qu'une indignation de façade - une politique globale ! Il est tellement plus simple de gouverner quand le peuple se contente de «trembler en paix»…

Or, par-delà les postures, l’incroyable légèreté avec laquelle les victimes ont été traitées depuis une décennie est frappante. Sous couvert de compassion, le pouvoir n’a eu de cesse que les victimes soient empêchées de faire valoir leurs droits. En érigeant d’abord en dogme une politique du chiffre qui a contraint les services de police à refuser de recevoir un nombr