Vouloir prendre part au débat public en tant que patron d’une grande entreprise privée sonne en France comme un paradoxe. Pourtant, dans le malaise de la crise actuelle, les patrons n’ont jamais été autant appelés à s’expliquer. Le silence de ceux qui se taisent est vécu comme une insupportable arrogance. Mais la voix de ceux qui sortent de leur réserve reste pour beaucoup une forme d’ingérence. Le crédit accordé par l’opinion aux discours des grandes entreprises s’est particulièrement restreint. Et paradoxalement leurs dirigeants pourraient bien devenir ceux dont on attend beaucoup et dont on n’espère rien.
Alors, à quoi bon prendre la parole ? D’abord, pour cesser de laisser les autres parler à notre place. C’est bien connu, les absents ont toujours tort. Mais s’exprimer pour s’ajouter au concours de celui qui parlera le plus fort ou le plus «vrai» serait vain. Réclamer le droit à la parole implique le devoir d’écouter les autres. Certains ont d’ailleurs bien compris qu’engager le dialogue avec les grandes entreprises est finalement le meilleur moyen de les aider à s’ouvrir. Et elles en ont besoin.
Le propos n’est pas non plus d’appeler au mélange des genres ou d’entrer en politique. Pour moi, notre légitimité s’arrête à ce que nous connaissons. En revanche, comment croire que, dans un débat qui éclairerait les choix politiques à venir en matière d’énergie, l’expertise de Total, engagé dans ces métiers sur tous les continents depuis des décennies, n’apporterait rien ? Nous e